***Si vous n’avez pas encore lu les parties 1, 2 et 3, c’est ici, ici et ici!***
Ce soir, chez elle, Rosalie est toujours aussi sonnée par ce qui lui est arrivé en fin d’après-midi. Elle est assise bien droite sur son sofa, devant la télé, et fixe cette dernière sans réellement la voir. Elle se repasse plutôt en boucle la vision – non, doit-elle se répéter, ce n’était pas une vision! – qu’elle a eue quelques heures plus tôt. Elle y cherche une signification, une explication, mais vraiment, elle ne comprend rien. Aussi difficile que ça puisse l’être, elle doit accepter qu’elle s’est transportée ailleurs, comme par magie, l’espace de quelques secondes, mais tout en restant aussi ici, dans le monde réel. Ça, elle ne peut qu’en être certaine, parce que Gabrielle, Mélanie, Jean et le dernier client de la journée étaient là et la voyaient. C’est comme si elle s’était trouvée à deux endroits différents en même temps.
– C’est impossible, ça ne se peut pas!!
Rosalie se surprend à crier cette phrase à elle-même, toute seule dans son salon. Elle se penche vers l’avant, appuie ses coudes sur ses genoux et se prend la tête à deux mains, totalement désemparée. Alors que son regard se pose sur son plancher de bois franc et le fixe, Rosalie a l’impression que le grain de son plancher est mouvant, comme si les motifs qui ressortent du bois se sont tout à coup mis à bouger. Elle s’empresse de fermer les yeux et se frottent doucement les paupières avec la paume de ses mains. Alors qu’elle les rouvre, toutefois, ce n’est pas le plancher de son salon qu’elle voit.
Rosalie est revenue dans cette fameuse pièce grise trop illuminée. Encore une fois, elle est couchée sur le dos, immobile, mais lorsqu’elle essaie de regarder autour d’elle, elle réalise que ses yeux n’ont plus de difficulté à regarder de chaque côté. Elle peut même tourner la tête!
Malheureusement, il n’y a pas grand-chose de plus à voir que ce qu’elle a vu cet après-midi. Excepté la surface dure sur laquelle elle est couchée, rien d’autre ne se trouve dans la pièce. Ça ne semble être qu’une petite pièce grise carrée très minimaliste. Rien pour l’aider à savoir où elle se trouve, donc.
Elle tente de bouger ses doigts – elle y arrive! – et ses pieds – ils répondent aussi! -, puis essaie de se relever. Plus rien ne la retient, visiblement, parce qu’elle se retrouve assise sans problème. Elle regarde l’espèce de table métallique sur laquelle elle est assise et il n’y a aucune trace de contentions quelconque. C’est étrange, mais rendu là, plus rien ne l’étonne vraiment. Elle regarde partout autour et ne distingue absolument rien, excepté une porte derrière elle. C’est définitivement la seule manière d’entrer et de sortir de cette pièce. Rosalie saute en bas de ce qui lui servait de lit; ses pieds touchent le sol, qui se trouvait à peine à quelques centimètres, mais ses jambes n’arrivent pas à supporter son poids et elle s’écroule de tout son long sur le plancher froid. Ses jambes sont faibles, comme si elle avait passé un très long moment immobile et qu’elle tentait de se tenir debout pour la première fois depuis des semaines.
Doucement, elle se remet debout. Ses jambes sont flageolantes, mais elle réussit à avancer vers la porte à petits pas, se retenant à la surface métallique autant que possible. La porte ne comporte qu’une petite fenêtre carrée de quelques centimètres, juste assez grande pour que Rosalie puisse apercevoir un long corridor qui s’étend devant elle, lui aussi entièrement gris et éclairé par des néons éclatants. Au bout du corridor se trouve une grande porte vitrée qui semble mener vers un autre corridor perpendiculaire à celui dans lequel elle se trouve. Elle en a la confirmation lorsqu’elle voit une femme apparaître dans cet autre corridor, vêtue d’une longue blouse grise, un porte-bloc à la main. Affolée, Rosalie se retire rapidement de la petite fenêtre, plaque son dos au mur et cesse même de respirer, question d’être le plus discrète possible, même si la femme se trouve à au moins 30 mètres de la pièce où elle se trouve et que deux portes les séparent.
Rosalie attend environ une minute – la minute la plus interminable de sa vie – et comme elle n’entend aucun son, elle se risque à regarder de nouveau par la fenêtre. La femme a disparu. Elle a sans doute continué son chemin sans même prendre la peine de jeter un oeil par la porte vitrée.
Soulagée, mais non moins troublée, Rosalie tend la main vers la poignée de la porte. Comme elle s’y attendait, elle est verrouillée. Elle se retourne et se laisse glisser au sol en se prenant la tête à deux mains. Mais qu’est-ce qui se passe? Pourquoi est-elle enfermée ici? Et depuis combien de temps? Comment peut-elle être ici et pourtant ailleurs en même temps? Elle sait que quelque part, elle se trouve aussi chez elle, dans son salon, mais pour le moment, son esprit est ici et elle ne comprend pas comment c’est possible.
Alors qu’elle penche la tête pour reposer son front sur ses genoux, elle laisse ses mains glisser dans ses cheveux pour rejoindre l’arrière de son cou et elle sent de légères bosses un peu partout sur son crâne. Elle a toujours eu de légères proéminences sur la tête – rien de grave selon les médecins qu’elle a consultées, de légères déformations crâniennes sans conséquences -, mais elles lui semblent différentes en ce moment. Plus accentuées, moins lisses. Elle s’attarde à deux protubérances, une de chaque côté de sa tête, et elle se rend compte qu’à ces endroits, elle n’a plus de cheveux et ce qu’elle touche ne lui semble pas être de la peau. La surface est plus dure et plus rugueuse que de la peau. Elle tâte doucement d’autres bosses sur son crâne et réalise qu’elles sont toutes semblables.
Alors qu’elle vérifie une ixième bosse, elle sent quelque chose bouger sous ses doigts. Mortifiée d’avoir quelque chose qui bouge dans son crâne – quelque chose qui a visiblement été inséré là à un moment ou un autre et pas seulement en un exemplaire si elle se fit à la quantité de bosses qui recouvre son cuir chevelu -, elle tente d’agripper doucement cette chose et de tirer dessus. Cette dernière se déloge facilement et Rosalie n’en ressent aucune douleur. Elle l’observe attentivement; il s’agit d’une toute petite pièce de… De quoi, au juste? De plastique? Rosalie n’en a aucune idée, mais en la regardant de près, elle trouve que ça ressemble drôlement à une espèce de puce recouverte de petits circuits. Rosalie s’empresse de survoler toutes les bosses de son crâne qu’elle n’a pas encore explorées et lorsqu’elle termine, elle a 3 petites puces de plus dans ses mains, toutes similaires.
Donc ces légères déformations crâniennes qu’elle a toujours eues n’en sont pas vraiment. Des puces ont été insérées dans son crâne. Quand? Elle ne le sait pas. Par qui? Elle le sait encore moins. Et pourquoi, cette fois, reste-t-elle aussi longtemps dans cette pièce sans revenir à elle, dans son salon, dans la réalité? Ces quelques puces qui ne sont plus connectées à son crâne en sont-elles la raison?
Rosalie n’a aucune certitude, aucune réponse à ses nombreuses questions, mais elle compte bien remédier à cela. Et vite.
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Glitch - partie 3 -- Noir sur blanc - Blogue littéraire
7 octobre 2018 at 21 h 56 min[…] Vous avez aimé? La suite est ici! […]